« Miroir, ô mon beau miroir, dis-moi qui est le plus beau ? » Cette phrase magique, Jean-Michel se la répète chaque matin dans sa salle de bain, fier et comblé par son nouveau look hyper tendance de hipster 3.0. C’est un autre homme, un de ceux qui triomphent dans la vie !
Issu d’une famille modeste d’un petit village de la Creuse, le jeune Jean-Michel « monte « à Paris en 2014, son BAC en poche, bien décidé à conquérir la capitale et à se faire un nom. Mais, les années passent et l’apprenti jet setter continue son travail routinier de comptable dans une papeterie du 20ème arrondissement. Pas de copine, un réseau amical qui se restreint à son vieux pote Pascal, lui aussi « monté » à Paris et de son collègue de bureau Mathias, un auvergnat pure souche qui guette sa prochaine mutation à Aurillac.
Et puis un jour c’est le déclic ! « La Miche », comme le surnomment affectueusement ses collègues, découvre avec stupéfaction un reportage sur les hipsters américains et leur façon originale de se coiffer, se raser et se vêtir. Aussitôt il saute le pas et se précipite chez son coiffeur puis chez le barbier et enfin chez le tailleur pour arborer, comblé, un look on ne peut plus à la mode !
Il se fait même tatouer les deux bras (c’est viril et ça fait cool !) et apprend à marcher avec élégance, prend des cours de maintien et se met à fréquenter ce fameux monde huppé dont il rêvait depuis son adolescence. La vie 3.0 c’est ça qu’il voulait ! Désormais il peut se prévaloir d’une approche quasi quotidienne du milieu « jet setters modestes« , ceux qui n’ont pas trop de fric, mais c’est un bon début.
Hélas, ses tentatives de conquêtes se soldent par des échecs et ses élans enthousiastes d’orateur cultivé et charismatique virent au cauchemar. Les filles se moquent et ricanent discrètement, les hommes le raillent et l’isolent de leur cercle. On s’écarte de lui, on le fuit, pire on ne l’invite plus.
Après plusieurs tentatives de suicide et au terme de sa 94ème consultation chez son psy, Jean-Michel, ce provincial de classe populaire a finalement compris qu’il ne servait à rien ne vouloir péter plus haut que son cul car l’odeur est nauséabonde, et qu’il valait mieux restait soi-même, vrai et authentique, fidèle à ses valeurs et à ses aspirations.